Un grain de sable s’est logé dans ma chaussure. Il a quitté son univers maritime. Modelé, roulé, arrondi presque doux quand je le prends entre mes doigts. Il vient de très loin, il a oublié qui il était. Il n’est plus qu’infiniment petit alors qu’il avait été un bloc puissant, solide devant les attaques répétées des marées.
La dernière fois, à la fin du mois d'août, quand j’avais foulé la grève, les petits entreprenaient un barrage, pour lutter contre la montée des eaux. Un dernier rempart avant de rentrer, avant que la portière se referme sur l’été finissant. Un ultime mur pour laisser une trace éphémère. Nous étions armés de pelles et de seaux, avec une volonté farouche, nous montions une butte « infranchissable ». Avant d’assister à l’effondrement inéluctable de la forteresse.
Après des cris et des pleurs et la promesse que nous recommencerions l'année prochaine un édifice plus solide, nous avons quitté la plage sous une averse orageuse. Les larmes ont séchées devant des assiettes de crêpes sucrées.
Chacun avait collecté le plus beau coquillage ou le plus beau galet, et des grains de sable dans les baskets. Le monde poursuivait sa route, et l’enfance est le temps des merveilles et des défaites. Une tristesse infinie, s'éteint d’un éclat de rire d’une joie débordante.
Sylvia 83