180 -ème Proposition. Un bien agréable déjeuner sur l’herbe.
Rencontre au Paradis.
Parties tôt ce matin, les chaussures de randonnée aux pieds, le pique-nique dans le sac à dos, la casquette sur la tête, nous avalons gentiment des kilomètres sous le soleil tiède de mai.
Nous déambulons sur le sentier du bord de côte entre rochers façonnés par le vent d’ouest, garrigue et mer. Nous cheminons toutes les trois en humant l’air marin si doux, offrant notre visage à la caresse de la brise chargée d’embruns et de parfums du maquis. Tous nos sens en éveil rejoignent un ailleurs mystique palpable par nous seules. Nous communions avec le lieu, notre chair et notre esprit à vif. Nous saluons les rapaces qui nichent dans les hauteurs. Nos regards se perdent sur la vaste étendue d’eau en mouvance, s’accrochent à un voilier blanc minuscule qui scintille comme un bijou. Après une pause à l’ombre d’un chêne liège au tronc courbé, le chemin sinue en pente douce et nous arrivons sur une pointe de prés salés où paissent quelques vaches placides. La plage est proche, déserte, nous posons nos affaires sur la partie herbeuse et courrons nous baigner. Au retour, nous posons un paréo en guise de nappe, sortons nos boites à déjeuner, les fruits, les gourdes. Revigorées par le bain salvateur, nous nous régalons en plaisantant, discutant et nous félicitant d’être seules au monde dans ce coin de paradis. C’est ce que nous avons lu sur un panneau de bois en empruntant cette direction : « ici vous entrez au paradis ».
L’imprévu nous surprend de façon radicale. Sur la ligne verte d’horizon des pâturages, des silhouettes fines se profilent, se dirigent vers notre ilot herbu. En les voyant s’avancer, nous éclatons de rire, elles sont nues ou plutôt ils sont nus car vu de près aucun doute. Ils se baignent et s’installent sans gêne, en nous scrutant d’un air moqueur. Nous les ignorons. De les savoir nus, nous dérange. Nous gagnons l’eau verte transparente. A notre retour un groupe de filles en tenue d’Eve palabre tout près. La tranquillité est gâchée. En partant, le panneau en bois qui annonce le paradis indique au verso « plage de nudistes » et sur le côté recto : « vous entrez au paradis ». Quelqu’un ou le vent a fait une blague, a changé le sens. Cela dit, l’endroit est merveilleux, nous reviendrons et pourquoi pas en adoptant le style du Paradis ! Zuzanna83.