204ème :
«Craignant l’oubli, j’ai mis tous mes souvenirs dans une boule en or...»
Préservation ...
Levé très tôt, selon mon habitude, avant même les premières lueurs du jour, j’étais allé m’asseoir au bord de l’étang paisible et silencieux. Dans mon dos, et dans la pénombre, le vaste manoir familial était lui-aussi endormi, j’étais au calme…
J’observais la nappe parfaitement étale, les créatures l’habitant n’étant pas encore réveillées.
Dans le ciel commençaient à poindre les premiers signes de clarté. Le soleil s’élevait très lentement au-dessus de la crête, éclairant progressivement le joli petit village encore endormi dans la vallée. La lumière s’installait petit à petit sur les cimes des arbres, les toits des maisons et le clocher de l’église, redonnant vie à la nature, aux animaux sortis de leur torpeur, aux fleurs multicolores des prairies… J’étais émerveillé par cette renaissance pourtant quotidienne mais toujours magique et enchanteresse.
Je me remémorais de nombreux pans de ma longue existence. Que de souvenirs ! J’en étais ému.
Je me dis qu’il ne fallait surtout pas oublier tous ces moments, qu’ils aient été heureux ou malheureux, mais tout faire pour les conserver intacts.
Je me levais et retournais à la maison, me dirigeais directement vers le grand salon et y retrouvais dans une vitrine un superbe œuf de Fabergé, en or magnifiquement décoré. Décidant de lui confier tous mes secrets , je le pris, l’ouvris en deux, et lui soufflais l’ensemble de mes souvenirs afin qu’il les absorbe... puis je montais à l’étage et empruntais l’immense corridor sur lequel donnaient toutes les portes des chambres et offices du manoir. Tout au bout, à deux mètres de ma propre chambre, sous un imposant œil-de-bœuf était une ravissante console en bois de rose joliment éclairée chaque nuit par la lune, et je décidais d’y déposer là mon précieux joyau.
Ainsi étais-je rassuré… quoiqu’il arrive aucun évènement de ma vie ne serait jamais perdu !
KD44♫