210ème Lorsque le soleil s’est couché sur la mer, j’ai vu se profiler l’ombre….
Ombres et lumières
Lorsque le soleil s’est couché sur la mer, j’ai vu se profiler l’ombre du phare. Le reflet de sa lanterne ondulait au bout de son image. La lune avec sa blanche et froide incandescence harmonisait les contours à l’instar d’une caméra.
Les feux de l’astre étaient presque éteints lorsque à l’horizon surgit un rayon vert. Le spectacle était inattendu. J’ai cru d’abord à une illusion optique, mais l’éclat vert a dominé brièvement la ligne à l’endroit où le soleil avait disparu. Cet évènement rarissime est censé porter bonheur. On raconte aussi que c’est le lien de passage entre le monde des morts et celui des vivants.
Assise sur la rive face à l’horizon, j’étais sous l’émotion de cette apparition. Quand soudain dans les jeux d’ombre et de lumière de la mer, je vis une barque qui oscillait près du phare, deux personnes y étaient installées, une jeune femme nue avec une longue chevelure et un homme en combinaison de plongée. J’ai fantasmé : une sirène ? mais l’homme a plongé avec un fusil harpon de chasse sous-marine, exit le prince charmant ! Elle a sauté dans l’eau derrière lui dans le plus simple appareil et a nagé jusqu’au phare, elle s’est assise sur un gros rocher puis est revenue au bateau. Je distinguais sa silhouette en noir et blanc, héroïne d’un film d’animation d’ombres chinoises, avec le délicat clapotis des vagues en fond sonore. Après un long moment, le pêcheur est remonté, chargé de poissons attachés à sa ceinture. Je les voyais s’activer, la barque était secouée, la houle se levait. Enfin l’embarcation prit la mer vers le port ses feux de bâbord, tribord et de poupe tressautant et miroitant dans la baie. J’écoutais longtemps le tac - tac saccadé du moteur qui s’amenuisait dans le lointain. J’embrassais du regard la vaste étendue mouvante et chatoyante, le phare et la lune, trio magique de la nuit installée et traversais la plage déserte, éblouie et rassérénée par cette soirée, étonnée des imprévus qu’offre la nuit, lorsque tout est endormi.
Zuzanna 83