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192ème :
« J’ai gagné un week-end... »

Le numéro treize !

Assis à une table de huit personnes, toutes plus fébriles les unes que les autres, j’observe tristement ma grille de loto, déçu de n’avoir pas gagné le moindre petit lot depuis le début de la séance.

Je me dis que décidément je n’ai vraiment pas de chance aujourd’hui...
Du haut de son estrade l’animateur annonce  « Mesdames et Messieurs nous allons maintenant jouer pour le gros lot : un week-end pour deux personnes, tous frais payés, dans un superbe manoir des Highlands, au nord de l’Écosse ! » Tous les joueurs retiennent leur souffle… « Le numéro tiré est… le treize !!! » Et là, ahuri, je bondis littéralement de ma chaise ! c’est moi qui l’ai !! La chance me sourit enfin. Sans plus attendre je me précipite vers l’estrade, et l’animateur me remet une grande enveloppe. Je suis fou de joie. Une fois à la maison, ma femme et moi nous empressons d’examiner le contenu de ce merveilleux cadeau. Nous y trouvons tout : les billets d’avion en classe affaire, les bons de transport en taxi de luxe, le formulaire de réservation de la suite la plus confortable de la propriété, un dictionnaire bilingue au cas où, et une indication qui nous amuse beaucoup :
VOUS SEREZ CAPTIVÉS PAR L’AMBIANCE PARTICULIÈRE DE CE MANOIR HANTÉ !
« Comme ils ont de l’humour ! » me dit mon épouse avec un petit rire aigu, mais... légèrement frissonnant, malgré tout… Sur ce, nous préparons nos valises, très excités par la perspective de ce voyage. Deux jours après nous arrivons sur les lieux. Il fait un temps effroyable, glacial, le ciel est noir, la pluie tombe drue et un vent violent balaie le paysage angoissant qui nous entoure. L’impressionnante bâtisse médiévale, la seule présente dans ce climat hostile, se dresse comme une menace qui nous intrigue fortement. Le chauffeur nous dépose devant l’entrée où nous attend, muni d’un énorme parapluie, le très digne majordome vêtu d’un kilt aux couleurs de son clan. Il nous accompagne dans le hall où nous sommes accueillis par un air de cornemuse en guise de bienvenue. Pour un dépaysement, c’en est un ! Le maître d’hôtel nous offre un grand verre de whisky, puis nous invite à nous attabler dans l’immense salle à manger, froide et austère. Le « haggis » nous est servi… vous savez, ce plat typiquement écossais fait de panse de mouton farcie à la fressure de l’animal… c’est spécial ! Ce repas bourratif terminé, nous gagnons notre suite royale dont les vitres des fenêtres sont violemment fouettées par les puissantes bourrasques de pluie. Pas très rassurés, nous allumons toutes les lampes et faisons comme si de rien n’était… mais… il va bien falloir se coucher ! Comme il fait froid, c’est ce que nous faisons, après avoir éteint toutes les lumières… Face au lit, la grande cheminée de pierre émet des sons épouvantables, c’est absolument lugubre. Impossible de trouver le sommeil ! Nous sommes effrayés. Le moindre bruit nous fait sursauter… En fait, ce numéro treize aura été une vraie catastrophe ! Un cadeau empoisonné !! dire que cela durera tout le week-end...
Dans l’avion du retour, épuisé, je m’adresse péniblement à ma femme qui n’en peut plus de fatigue : « tu sais, ma chérie, je crois que jamais plus je ne jouerai au loto ! » Et je m’endors aussitôt...
KD44♫