Je viens d’entendre sa voiture remonter l’allée qui mène à la maison. Ma sœur adorée, Sarah étudiante en droit, rejoint chaque samedi notre cocon familial. C’est la plus belle fille du monde, mon modèle, je rêve de lui ressembler je veux être sa jumelle, enfin dès que j’aurais grandi.
Je n’ai que douze ans. Elle 18.
J’entends ses baskets compensées fouler l’allée de graviers. Vite je me cale dans un fauteuil du salon, je fais semblant de feuilleter « la semaine juridique » mais je n’y comprends rien. Je l’entends rire à la cuisine avec maman, elle m’appelle, j’entends le cliquetis de ses bracelets, elle ouvre la porte, - « Salut Petite. » Je lui saute au cou, respire son parfum de mandarine. – Tu as grandi depuis la semaine dernière ! dit-elle !
-Oh Tu triches ! Tu portes les mêmes chaussures que moi, donc deux faux centimètres de plus!
Je la suis dans sa chambre, je lui emprunte son vernis bleu, son chandail noir avec son odeur fruitée ! Tu me le prête ? Oui, il s’appelle « revient » dit-elle en riant.
- « Pourquoi as-tu aussi coupé tes cheveux ? me demande- t-elle ?
C’est dommage, tu as des cheveux ondulés et épais, laisse-les pousser, les miens sont raides et fins, je les préfère courts ! » Je lui réponds : - « Ta coiffure est si stylée ! Tu as une belle frange ! » Elle me regarde dans les yeux : « Pourquoi veux-tu faire tout comme moi ? Le maquillage ! tu oublies tu es trop jeune ! Elles sont comment tes copines ? » - « Des bébés ! » lui dis-je dépitée. « -Il faut vivre ton âge pleinement, grandir c’est découvrir pas copier, tu as une personnalité tu dois l’éveiller, pas l’ignorer. » Je n’aime pas ce qu’elle me dit, je ne veux pas jouer aux barbies ni aux jeux vidéo, qu’elle le veuille ou non, elle est mon idole, je ferai tout comme elle. !
Le temps passa. Les visites hebdomadaires de Sarah s’espacèrent. J’étais désespérée. A Noël, elle nous annonça une surprise, Papa fronça les sourcils en accent circonflexe, maman sourit comme si elle savait. Il arriva avec un bouquet de fleurs comme dans les séries américaines, Sarah ne regardait que lui. Je n’existais plus. Alors j’ai repris affligée le cours de ma treizième année.
Zuzanna83
