239/FRUIT DE FÊTE
Ce jardin sans attrait, tout en longueur traversé par une allée rectiligne sans charme menait sans surprise à la porte d'entrée de la maisonnette au toit bas. Nous étions loin du jardin d'Éden et vert espace eût été bien ordinaire si le pommier centenaire, nu l'hiver, ne nous offrait sa magnifique parure rose dès le mois d'avril. C'est chaque année une fête, cet arbre anoblit cet endroit si banal le reste du temps.
Quand vient le fruit c'est une apothéose. Mais nous n'avions que le droit de regarder ces grosses boules rutilantes et si tentantes que même Ève n'y a pas résisté.
Comme pour Eve, interdit de les cueillir sur l'arbre encore moins croquer ce fruit ensorcelant !
Allions-nous attendre que le vers soit dans le fruit ou transgresser l'interdiction ?
En cachette j'en avais saisi une bien rouge, frottée avec la manche de mon pull j'y ai planté mes petites dents. La trace de ma bouche avait fait place à un sourire d'un blanc éclatant.
J'étais rassurée, le fruit avait pardonné ma gourmandise.
Depuis, chaque fois que je vois les panniers de pommes, je pense au jour de cueillette où bonne-maman honteuse, en mordant dedans y avait laissé ses dents... Elle aussi avait bien compris la leçon et , par la suite ne les a plus mangées... que cuites.
On a beau dire... Croquer la pomme reste un plaisir, un cadeau de la vie.
🐭 La Souris 83