C’est en voiture que je l’aie aperçue. En haut du mamelon qui surplombe la route, cette bâtisse flanquée d’une tourelle, m’a attirée. Croyant visiter une chapelle désacralisée, je suis charmée par une bicoque des années 30 qui part à vau-l’eau et porte bien son nom : « A Tous Vents ». Ces derniers bataillent et vocifèrent en haut du campanile, font tourner la girouette en bourrique qui perd le nord, même en ce jour calme de printemps.
Du jardin, la vue sur la plaine et la forêt est sublime, à l’horizon la mer. Un panneau « A Vendre » avec un numéro de téléphone, se balance en crissant sur le mur. Elle parait inhabitée. Je frappe, j’ouvre sans problème, m’annonce, un chat- noir -au -poil- hérissé s’enfuit en miaulant. Je me hasarde dans la maison, les meubles sont recouverts de draps. Une odeur de papier mouillé, de renfermé m’assaille. Au milieu de ce décor figé, une vieille dame dort dans une bergère, un châle bleu sur les genoux. Un vent siffleur s’infiltre par la porte ouverte, dérangeant l’atmosphère, faisant claquer des portes. Elle se réveille, effrayée par ma présence : Elle peste puis se ressaisit. « Qui êtes-vous ? Demande-t-elle ? Je lui raconte mon intérêt pour cette maison vue du bas de la colline. Elle est surprise : « Vous êtes bien la première ravie… » elle me raconte son histoire, sa belle vie dans cette maison, la mort de son mari et l’obligation de s’en séparer ne pouvant plus l’entretenir. » Je lui parle du vent, elle rit, : « Ici, les vents soufflent, houspillent, éloignent les intrus, ce sont de bons génies, gardiens de la maison. » Je téléphone à l’agent immobilier, lui relate ma rencontre avec la propriétaire. Celui-ci m’informe qu’elle est décédée l’année dernière, que personne n’y vit aujourd’hui qu’il arrive de suite. Je suis abasourdie, je n’ai pas rêvé ! J’entre de nouveau dans la maison : Dans le fauteuil, le chat- noir-au-poil- hérissé dort sur l’écharpe bleue en ronflant.Aucune trace de la vieille dame. Le vendeur me rejoint, découragé mais pas étonné. Il me montre une photo où je reconnais la personne. - " Elle visite souvent sa maison, enfin son fantôme ! Elle disparaitra pour de bon lorsque la maison sera vendue à des gens convenables m’a-t-elle dit ». Il est excédé ! – « Comment voulez-vous vendre une maison hantée ? ».
Zuzanna83