Sur son carton à même le bitume, il est assis en tailleur. Devant lui sa tasse bleue émaillée, quelques pièces au fond. Se saisissant de sa vieille guitare, il entonne la chanson d’Yvan Rebroff »Ah si j’étais riche … ». De sa silhouette menue sort un filet de voix aux antipodes de celle profonde du ténor. En encouragement, des passants lui jettent leur menue monnaie.
En avait-il bâti des châteaux en Espagne... Il devait faire le tour du monde mais sa vieille guimbarde n’avait pas dépasser la porte de Bagnolet. Embarqué sur un thonier, on l’avait débarqué au port de relâche, pour cause de terrible mal de mer. Dans un hameau déserté, il voulait tout retaper, installer un complexe touristique et sportif … banque et associés l’avaient lâché, le traitant d’hurluberlu. D’une paillotte corse, il avait voulu lancer le dernier club à la mode, imaginant la jet set y prendre ses quartiers … Quand cela ne veut pas …
Se plante devant lui un type élégamment vêtu. « Alors mon vieux, cela fait des lustres que je te cherche … mais où donc étais-tu passé ? ». Abasourdi, il le reconnait, son pôte de galères. Ensemble, ils en avaient bâti des châteaux, et pas qu’en Espagne ! Leurs chemins s’étaient séparés un jour de printemps sur un malentendu.
Accoudés au zinc du bistrot « Des grands hommes », ils sirotent un crème, se racontant leurs vies passées. « Depuis 3 ans, je te cherchais mon ami. Te souviens-tu du café de la Mère Irma ? Nous avions l’habitude d’y remplir nos grilles de jeux … eh bien vois-tu, nous avons gagné le gros lot. Il a fructifié en t’attendant … Tu vas pouvoir réaliser tous tes rêves les plus fous. Tu es multi millionnaire ! ».
78 Cathy👩🏻🦯🦮