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Arrivés de bonne heure en famille nous nous étions préparés à un bon après-midi, papi, mamie et moi. J'adorais la prestidigitation et mon grand-père avait entendu parler de ce magicien comme d'un type très fort. Dès l'entrée, l'ouvreur nous mit dans l'ambiance en distribuant des chapeaux pointus colorés qui descendaient jusqu'aux épaules comme pour le vaudou.

Et pour éviter les applaudissements qui auraient cassé l'ambiance mystérieuse de la magie, nous reçûmes un petit tambourin à agiter pour exprimer notre joie. Nous nous assîmes donc au milieu d'une salle de sorcières et d'enchanteurs.
Le ton était donné.
Le prestidigitateur à son entrée en scène fut accueilli joyeusement par les cliquetis des cymbalettes. Il se courba pour saluer l'assistance dans une profonde révérence en écartant les bras sous sa cape noire qui, en s'ouvrant, lui donna l'air d'une chauve-souris. Puis souleva son chapeau d'où une tourterelle s'échappa.
On oublia le magicien, les grelots des tambourins cessèrent laissant place a un silence juste troublé par le bruit velouté des ailes. Tous, nous fixions l'oiseau... son vol lourd, lourd... et qui tournait... tournait... et nos yeux et notre tête avec. La salle était comme hypnotisée suspendue aux mouvements de l'animal, on avait l'impression qu'il détenait le pouvoir de notre destinée. Planait en même temps que le volatile une petite angoisse qui sourdait dans nos mains froides et moites. Tout à coup je pris conscience que mon pépé soufflait aussi fort que lorsqu'il montait une côte ou poussait sa brouette. Mais là, Il était assis ! Mamie s'essuyait le front de son grand mouchoir blanc et moi j'étais frigorifié. J'avais quitté l'oiseau des yeux et n'avais qu'une hâte :
sortir avant qu'il ne soit trop tard... Enfin la tourterelle cessa son périple et retourna sur la scène où elle retrouva la chauve-souris assoupie sur le tabouret, enfermée dans ses grandes ailes repliées ...
Nous sortîmes en titubant légèrement. Pépé marmonnait : décidément il est fort ce gars là ! Oui... Il est sacrément fortiche !
C'est un souvenir qui ne m'a jamais quitté surtout quand arrivent les vacances de fin d'année.
🐭La Souris 83