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207/Devant une friterie, dans une poubelle, un vieux papier raconte sa vie...


LES PÉRÉGRINATIONS D’UN PAPIER GRAS.
Après avoir été arbre, je fus papier, puis imprimé, j’ai même fait la Une d’un grand quotidien.


Parcouru avec attention le matin, suis passé de mains en mains pour finalement être abandonné sur la table d'un café.
Recueilli par un marchand de marrons, il m’a chauffé les mots auprès d’un brasero.
Content malgré tout parce-que j’étais au chaud.
Un mangeur de châtaignes après s'être régalé, sans ménagement m’a jeté chiffonné sur le pavé.
Je n’ai pas aimé du tout et ça m'a mis en boule.
Des gamins en mal de jouer au foot, d'un shoot m'ont envoyé dans un panier... Une poubelle !
Dans ma corbeille en fil de fer je me suis morfondu jusqu'à ce qu'un Paris-turfiste m'y rejoigne ainsi qu'un journal de cotations. Notre pronostic est pessimiste ! C'est l'arrivée d’un roman photos glamour et joyeux qui nous a réveillés.
En couverture l' héroïne blonde et bouclée est si jolie ! Succombera-t-elle au charme ravageur du bellâtre qui la courtise ?
Vite on tourne les pages, ça devient chaud ! Aussitôt le turfiste prend les paris. Va-t-elle… Va-t-elle pas ? Ça nous tient en haleine.
Mais on ne le saura pas car un sans logis s’en ai saisi.
Assis sur un banc il s’installe et le lit… Il sourit, se lève et me choisit dans la corbeille à papiers. Il me prend, me défroisse et entoure amoureusement sa bouteille qu’il met avec précaution dans la poche intérieure de sa veste. Puis reprend sa route en me serrant sur son cœur.
Pour moi, qui ne suis plus qu’un papier gras c’est une fin magnifique.
🐭 La Souris