190/INCOMPRÉHENSION
Ce matin le quartier est en effervescence.
La commission des riverains se plaint de la dégradation des immeubles.
La police va arriver.
Gertrude comme chaque jour est équipée pour son 'rendez-vous' matinal.
Elle vit seule. Sèche comme un bâton de berger, le visage ingrat, et le sourire souvent absent en ont découragé plus d'un.
Elle étouffe d'un trop plein de tendresse et personne d'autre à chouchouter que sa rencontre matinale devant la terrasse du café.
Le contact avec le forces de l'ordre est musclé.
Prise la main dans le sac, elle se défend bec et ongle face aux hirondelles, ces agents de police qui l'interpellent sans ménagement.
Hébetée, elle ne comprend pas ce que lui reprochent les policiers qui prennent ça pour de la provocation, voire un refus d'obtempérer.
Ils l'emmènent au poste.
On lui fait vider son sac.
Ses pauvres larmes glissent sur ses joues et les graines roulent, se répandent dérisoires sur le bureau des gens armés. Eux-mêmes gênés ont détourné la tête, le kiki serré devant ce spectacle aussi navrant.
Gertrude ne comprend toujours pas les explications : on ne donne pas de nourriture aux animaux sauvages !
Des animaux sauvages ! eux ? Les seuls qui lui roucoulent des mots doux...
Non, Gertrude ne comprendra jamais ça...
Le cœur gros, elle repart honteuse et humiliée...
S'en est fini de ses petits bonheurs matinaux...
Ça oui, elle l'a bien compris..
🐭 La Souris 83