Après le déjeuner familial qui s'attardait, le dimanche après midi nous aimions regarder les vieilles photos mal rangées dans un ancien carton à chapeaux. Elles étaient pèle mêle et l’un d'entre nous en tirait une au hasard et la commentait.
C’était un jeu et un rituel. C’était à mon tour d’en choisir une. Celle que je pris était jaunie par le temps, une date à l’arrière indiquait mai 1928. Je distinguais plusieurs personnes assises sur une barque voguant sur un étang. Je ne reconnaissais pas les personnes, était ce vraiment une photo appartenant à notre famille ?.
J’étais intriguée par la posture d’une jeune femme qui semblait très mal à l’aise. Ses épaules tombantes, son dos voûté montraient sa gêne, sa tristesse. Elle avait la tête baissée, paraissait fixer ses pieds et ne pas vouloir participer à l’ambiance environnante. L’autre femme et les deux hommes eux souriaient et semblaient heureux. Le contraste était saisissant. Ce cliché noir et blanc, pris à l’instant T soulevait il un problème de mésentente, de solitude, d’abattement, de "mal de mer" ?
Le cadre pourtant bucolique, et la saison printanière apportait de la douceur .
J’imaginais que c’était une promenade dominicale entre amis, et il était saisissant que cette jeune femme n’appréciait pas du tout d’être là.
Je rangeais le cliché.
Je savais que le dimanche suivant, notre grand oncle serait là, sa bonne mémoire et son grand âge nous seront utile pour démêler l’énigmatique promenade en barque.